Elon Musk recentre ses priorités sur Tesla après un effondrement des bénéfices

Face à une chute marquée des bénéfices, Elon Musk annonce un retrait partiel de ses fonctions gouvernementales pour se consacrer à Tesla.

Tesla a enregistré une baisse nette de ses bénéfices de 71 % au premier trimestre 2025, marquant sa pire performance depuis 2020. Face à cette situation, Elon Musk annonce un recentrage sur Tesla et une réduction de son rôle au sein de l’administration Trump, notamment dans l’équipe du programme « Doge ». Cette décision intervient dans un contexte tendu : protestations contre la marque, perte de la première place mondiale des ventes de véhicules électriques au profit de BYD, et impact des droits de douane américains sur la chaîne d’approvisionnement, particulièrement pour les batteries importées de Chine. Musk mise sur le lancement du Cybercab autonome, la montée en puissance de la production localisée, et l’arrivée de modèles plus accessibles pour redresser les comptes du groupe.

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Tesla enregistre sa pire performance trimestrielle depuis 2020

Au premier trimestre 2025, le bénéfice net ajusté de Tesla a chuté de 39 %, à 934 millions de dollars (environ 871 millions d’euros), tandis que le bénéfice net publié s’est effondré de 71 %, à seulement 409 millions de dollars (soit 381 millions d’euros). Le chiffre d’affaires de la firme est passé de 21,4 milliards à 19,3 milliards de dollars (18 milliards d’euros), en recul de 9 %, selon les données fournies par S&P Capital IQ.

Cette dégradation de la rentabilité s’explique par plusieurs facteurs structurels : ralentissement global de la demande, coûts élevés liés aux projets d’expansion, effets de change, et surtout forte dépendance à des composants importés, soumis à des droits de douane élevés. En conséquence, la marge opérationnelle s’est réduite à 2,1 %, contre 5,5 % un an plus tôt.

La perte de volume s’est aussi traduite par un recul de 13 % des livraisons de véhicules par rapport au premier trimestre 2024, soit une baisse de près de 117 000 unités, ramenant les livraisons mondiales à 774 000 véhicules sur trois mois. Tesla a perdu son rang de numéro un mondial de l’électrique au profit de BYD, son concurrent chinois, qui a vendu plus de 800 000 véhicules électriques sur la même période.

L’impact des choix politiques d’Elon Musk sur la perception de Tesla

Depuis sa prise de rôle en tant que conseiller spécial au sein de l’administration Trump — via le programme « Doge » (Department of Government Efficiency) — Elon Musk est devenu une figure politique visible. Il a notamment soutenu la campagne de Trump à hauteur de 250 millions de dollars, ce qui a suscité des critiques et des protestations dans plusieurs États américains, notamment en Californie et dans le Massachusetts.

Des manifestations ont eu lieu devant plusieurs concessions Tesla à la suite de prises de position jugées polarisantes de Musk. Cette dynamique a détérioré l’image de marque du constructeur, pourtant historiquement associé à une clientèle urbaine, progressiste, et soucieuse des enjeux climatiques. En liant Tesla à l’administration Trump, la marque s’est aliénée une partie de son socle de clients historiques.

Cette perte de capital sympathie se traduit directement dans les chiffres : des baisses de commandes ont été enregistrées dans les grandes métropoles américaines, notamment à Los Angeles (-18 %), New York (-12 %) et San Francisco (-25 %). De plus, la croissance en Europe occidentale a ralenti, particulièrement en Allemagne et en France, où les tensions politiques entre l’UE et les États-Unis ont également influencé la perception de la marque.

La dépendance stratégique aux chaînes d’approvisionnement chinoises

Tesla assemble tous ses véhicules vendus aux États-Unis sur le territoire américain, notamment dans ses usines d’Austin (Texas) et Fremont (Californie). Toutefois, une part significative des composants provient toujours de Chine, en particulier les cellules de batteries utilisées dans les gammes Model 3 et Model Y.

Depuis l’imposition par l’administration Trump de droits de douane de 25 % sur les composants automobiles en provenance de Chine, Tesla fait face à une hausse de ses coûts de production, notamment sur le segment stationnaire de stockage d’énergie (Powerwall, Megapack), où la dépendance à la Chine reste forte.

Le directeur financier Vaibhav Taneja a reconnu que cette situation pesait lourdement sur les marges. Pour y répondre, Tesla développe un plan de relocalisation industrielle : une nouvelle ligne de production de cellules de batterie est en construction dans l’usine de Giga Texas, avec une capacité prévue de 20 GWh par an. Des discussions sont également en cours avec des fournisseurs sud-coréens et japonais pour remplacer certains composants chinois d’ici fin 2026.

Mais ce changement nécessite des investissements lourds : environ 1,8 milliard d’euros sur deux ans, et ne produira d’effets tangibles qu’à partir de mi-2026, selon les analystes de Morgan Stanley.

Tesla mise sur l’innovation : Cybercab et modèles plus accessibles

Pour compenser la baisse de ses ventes et améliorer ses marges, Tesla table sur deux axes de croissance : le lancement du Cybercab, un véhicule autonome 100 % électrique destiné au transport urbain sans conducteur, et la production de véhicules à bas coût.

Le Cybercab, déjà en phase pilote à Austin, est conçu pour opérer en flotte robotaxi. Musk affirme qu’il sera lancé en juin 2025 et qu’il représentera un levier majeur pour les résultats financiers dès 2026. Selon les premières données internes, chaque Cybercab pourrait générer jusqu’à 50 000 euros de revenus annuels nets par véhicule, en supposant une utilisation quotidienne de 18 heures.

Parallèlement, Tesla prévoit de démarrer la production de nouveaux modèles plus abordables en juin. Positionnés en dessous des 25 000 dollars (environ 23 300 euros), ces véhicules visent à concurrencer l’offre croissante de voitures chinoises comme celles de MG ou NIO. Ces modèles devraient être assemblés sur une nouvelle ligne dédiée au sein de l’usine d’Austin, avec un objectif de production initiale de 180 000 unités par an.

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Les conséquences du retrait partiel de Musk du programme Doge

Le programme Doge, censé générer des économies massives pour l’État américain en supprimant les dépenses jugées inutiles, devait initialement réduire le budget fédéral de 2 000 milliards de dollars. Musk a récemment revu ces prévisions, annonçant une économie réelle de 150 milliards de dollars — soit environ 140 milliards d’euros.

Son retrait partiel du programme s’explique par l’achèvement de la phase initiale et par les limites légales imposées à un “employé spécial du gouvernement”, dont la mission ne peut dépasser 130 jours par an. En pratique, cela signifie que Musk pourrait rester impliqué jusqu’à fin 2025 mais de manière sporadique.

Ce retrait suscite des inquiétudes dans certains cercles conservateurs, où Musk avait été perçu comme un relais important pour réformer l’administration publique. À l’inverse, cela pourrait permettre à Tesla de retrouver un peu de neutralité politique, facteur essentiel pour reconquérir des marchés stratégiques.

Un recentrage stratégique indispensable

La combinaison d’une baisse de la demande mondiale, de coûts élevés liés aux droits de douane, d’un contexte politique clivant et de défis logistiques liés à la chaîne d’approvisionnement, a conduit Tesla à un point d’inflexion. Le recentrage d’Elon Musk sur ses fonctions opérationnelles dans l’entreprise apparaît comme une réponse tactique à une situation financière tendue.

Les perspectives pour 2025 reposent sur des paris technologiques risqués mais nécessaires : le Cybercab, la production localisée, la diversification des modèles, et une communication plus neutre politiquement.

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