Europe: Jusqu’à 37,6% de taxes imposées aux voitures chinoises
L’Union européenne envisage des tarifs jusqu’à 37,6 % sur les véhicules électriques chinois pour protéger son industrie automobile. Analyse des enjeux et impacts.
L’Union européenne (UE) s’apprête à imposer des tarifs douaniers significatifs sur les véhicules électriques (VE) importés de Chine, en réponse aux subventions massives accordées par Pékin à son industrie automobile. Ces mesures, qui devraient entrer en vigueur en novembre 2024, visent à protéger les fabricants européens face à une concurrence jugée déloyale. Les discussions entre l’UE et la Chine restent tendues, malgré les tentatives de négociation. Cet article explore les raisons de cette décision, les réactions des États membres, et les conséquences potentielles pour l’industrie automobile européenne et mondiale.
Les raisons derrière l’imposition de tarifs sur les véhicules électriques chinois
L’Union européenne justifie l’imposition de ces tarifs en réponse à ce qu’elle perçoit comme une concurrence déloyale de la part de la Chine. Les véhicules électriques chinois, massivement subventionnés par Pékin, sont devenus de plus en plus compétitifs sur le marché européen, mettant en danger l’industrie automobile locale. En 2023, la Chine a enregistré un excédent commercial de 293 milliards d’euros dans ses échanges de biens avec l’UE, un chiffre révélateur du déséquilibre croissant entre les deux blocs économiques.
La part de marché des marques chinoises dans le secteur des véhicules électriques en Europe a grimpé de 9 % en 2023 à 11 % en juin 2024, selon les données de DataForce. Cette progression rapide inquiète les responsables européens, qui craignent pour la survie de leur industrie automobile face à des prix chinois rendus artificiellement bas par des subventions étatiques.
Les tarifs envisagés, qui pourraient atteindre jusqu’à 37,6 % selon la marque, visent à rétablir une concurrence équitable. Ils s’ajouteront à un tarif douanier existant de 10 %, portant le total moyen à 20,8 %. Cette mesure, bien qu’impactante, ne vise pas à interdire les importations chinoises, mais à corriger les distorsions du marché induites par les pratiques commerciales de Pékin.
Les réactions des États membres de l’UE et des acteurs du marché
Les discussions autour de l’imposition de ces tarifs ont divisé les États membres de l’UE. Lors d’un vote consultatif en juillet, seules quatre nations ont voté contre, tandis que neuf autres se sont abstenues, ce qui équivaut à un soutien implicite à la proposition de la Commission européenne. L’Allemagne, en particulier, a exprimé publiquement ses réticences, craignant des représailles de la part de la Chine, mais s’est abstenue lors du vote.
Cette abstention allemande peut s’expliquer par l’importance du marché chinois pour les constructeurs automobiles allemands, tels que Volkswagen, BMW et Mercedes-Benz, qui y réalisent une part significative de leurs ventes. La Chine est un marché clé pour ces entreprises, et elles craignent que des tarifs supplémentaires ne déclenchent des mesures de rétorsion qui pourraient affecter leurs opérations en Asie.
Parallèlement, certains grands constructeurs européens ont critiqué ces tarifs, estimant qu’ils pourraient nuire à leurs propres efforts pour rester compétitifs sur le marché global, notamment en Chine. Ces entreprises sont déjà sous pression pour s’adapter aux nouvelles normes environnementales et aux transformations technologiques rapides du secteur, et elles craignent que des tensions commerciales ne viennent compliquer davantage leur situation.
Conséquences économiques potentielles et enjeux industriels
L’imposition de tarifs sur les véhicules électriques chinois pourrait avoir des répercussions significatives sur l’industrie automobile européenne. En premier lieu, cela pourrait entraîner une hausse des prix des VE en Europe, ce qui pourrait ralentir l’adoption de ces technologies pourtant cruciales pour atteindre les objectifs climatiques de l’UE. Bien que certains arguent que des véhicules électriques moins chers sont nécessaires pour atteindre ces objectifs, la Commission européenne estime que ces tarifs sont essentiels pour protéger une industrie automobile en pleine transition.
De plus, les tensions commerciales avec la Chine pourraient exacerber les défis auxquels l’industrie automobile européenne est déjà confrontée. La transition vers l’électrification et la numérisation des véhicules nécessite des investissements massifs en recherche et développement, ainsi qu’une restructuration importante des chaînes de production. Toute perturbation supplémentaire, qu’elle soit due à des représailles chinoises ou à des incertitudes commerciales, pourrait ralentir ces efforts.
Cependant, certains acteurs du marché voient ces tarifs comme une opportunité pour renforcer la production locale de VE en Europe. Des entreprises chinoises, anticipant ces tarifs, ont déjà commencé à ouvrir des usines en Europe pour contourner les droits de douane. Cela pourrait, à terme, encourager le transfert de savoir-faire technologique en Europe et stimuler l’emploi dans ce secteur.
Implications pour les relations commerciales entre l’UE et la Chine
L’initiative de l’UE de taxer les véhicules électriques chinois intervient dans un contexte de relations commerciales de plus en plus tendues avec Pékin. La Chine est actuellement le deuxième plus grand partenaire commercial de l’UE, mais les échanges sont marqués par un déséquilibre croissant, avec un excédent commercial nettement en faveur de la Chine. La Commission européenne a exprimé à plusieurs reprises son mécontentement face aux pratiques commerciales chinoises, qu’elle juge non conformes aux règles du marché.
Le commissaire européen au commerce, Valdis Dombrovskis, a souligné que le marché européen reste plus ouvert aux produits chinois que le marché chinois ne l’est aux produits européens. Il a appelé la Chine à revoir ses politiques industrielles pour créer un commerce plus réciproque. Cependant, les discussions entre les deux parties n’ont jusqu’à présent porté que sur des aspects techniques, sans véritable avancée vers une résolution du conflit.
Les relations commerciales tendues entre l’UE et la Chine pourraient avoir des répercussions au-delà de l’industrie automobile. D’autres secteurs, tels que l’électronique ou les énergies renouvelables, pourraient être affectés par des mesures similaires si les déséquilibres commerciaux persistent. De plus, ces tensions pourraient compliquer les efforts de coopération internationale sur des questions globales telles que le changement climatique, où la collaboration entre l’UE et la Chine est cruciale.
Entre protectionnisme et compétitivité
L’imposition de tarifs sur les véhicules électriques chinois par l’Union européenne représente un équilibre délicat entre la protection de l’industrie automobile européenne et le maintien de la compétitivité sur un marché globalisé. Les tarifs visent à rétablir une concurrence équitable face à des subventions jugées déloyales, tout en tentant de minimiser les risques de représailles commerciales.
À long terme, ces mesures pourraient encourager une plus grande production locale et le développement technologique en Europe. Cependant, elles comportent également des risques, notamment celui de voir les prix des véhicules électriques augmenter, ce qui pourrait freiner leur adoption et compromettre les objectifs climatiques de l’UE. Le succès de cette stratégie dépendra de la capacité de l’UE à naviguer dans ce contexte commercial complexe tout en soutenant l’innovation et la compétitivité de son industrie automobile.
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